vendredi 3 juillet 2009

Guadeloupe : deux mois après, qu'a apporté la grève générale ?

Guadeloupe : deux mois après, qu'a apporté la grève générale ?
alexjoubert, samedi 9 mai 2009 www.lenouvelhebdo.com


44 jours de grève générale, des commerces fermés, des approvisionnements alimentaires et énergétiques fortement perturbés, une économie à la dérive : deux mois après la signature d’un accord mettant fin au conflit guadeloupéen, le bilan des 44 jours de grève générale présente nombre d’épines pour des avancée bien dérisoires. Pourtant, dès la première semaine de crise, le Medef Guadeloupe avait averti le LKP que la grève générale générerait un important manque à gagner, le syndicat avait ainsi évalué à 130 millions d’euros le montant des pertes d’ores et déjà engendrées, qualifiant de mortel pour la plupart des entreprises de Guadeloupe cette grève générale de plus de 44 jours. Ce constat a été confirmé au fil des jours, de façon que la grève générale a amorcé une forte hausse du chômage, 30% contre 23% auparavant soit 14.000 guadeloupéens ayant perdus leur emploi.

Nouveau coup dur pour le secteur de la canne à sucre Les principales pertes ont été enregistrées dans le secteur touristique mais également dans celui de la canne à sucre, la grève générale ayant particulièrement affecté le bon déroulement des récoltes. Elles ont effectivement lieu durant la saison sèche, soit la période février-juillet. Or, la dose de saccharine contenue par les cannes varie en fonction des mois, la période la plus faste et la plus riche en saccharine (12% du poids total de la canne à sucre contre 7% à l’accoutumé) étant celle de février-mars : soit des dates superposables à celles de la grève générale.

La qualité de la récolte s’en est retrouvée amoindrie, au grand dam d’un secteur en proies à de multiples difficultés financières depuis le début du siècle. La canne à sucre antillaise a effectivement subi de plein fouet la mondialisation et l’émergence de nouveaux concurrents à l’image du Brésil et de l’Inde, la rendant dépendante des aides nationales et européennes : en 3 ans, l’état a revalorisé ses aides à destination des producteurs et transformateurs de plus de 46%.

Tourisme : la saison noire Premier employeur de l’île (10 000 emplois), le secteur touristique guadeloupéen, qui représente 7% du PIB local, a vécu une saison 2009 cauchemardesque marquée par des pertes hebdomadaires de l’ordre de 10 millions d’euros ! Le Club Med de l’île avait ainsi fermé dès la première semaine de grève, symbole d’un secteur qui n’a pas été épargné par la grève générale. Sur les 15.000 lits marchands normalement occupés en cette saison, les deux tiers furent vides assure le président d’une chaîne hotelière.

Les réservations étaient pourtant en hausse de plus de 8%, un terrible gâchis pour le secteur touristique qui au dela des pertes enregistrées cette saison devra assurer la pérennité de son image, et ainsi accepter quelques concessions tels que des tarifs revus à la baisse afin d’attirer une clientèle en mal de confiance. On est en train de réduire à néant les efforts de promotion et de communication qui avaient été entrepris depuis dix-huit mois pour redresser la situation. L’image de cette destination devenait un peu plus positive alors que la concurrence avec les îles voisines, comme la République dominicaine ou Cuba, est de plus en plus forte avait ainsi affirmé le président du syndicat des agences de voyage.

Conséquences désastreuses, bilan salué par l’opinion Si les conséquences de la grève générale sur l’économie guadeloupéenne ont été désastreuses, le mouvement a été unanimement salué par l’opinion : à en croire un sondage RFOGuadeloupe, 90% des guadeloupéens affirment avoir soutenu l’action menée par le LKP et 70% estiment que le conflit va améliorer leur vie.

L’accord du 5 mars, signé par le préfet de Guadeloupe, le président du conseil régional Victorin Lurel ainsi qu’Elie Domota a effectivement repris la grande majorité des revendications du LKP, y compris le très controversé article acques Bino, relatif à l’augmentation de 200€ des bas salaires. Vilipendée par le patronat, cette mesure n’avait été signé que par des organisations patronales mineures, au grand dam d’Elie Domota qui avait alors affirmé soit elles [les entreprises] appliqueront l’accord, soit elles quitteront la Guadeloupe. Au final, le gouvernement avait accepté d’étendre l’article à l’ensemble des entreprises de Guadeloupe, tout en assurant le financement d’une large partie du montant.

Par ailleurs, la grève générale en Guadeloupe a mis en lumières les problèmes liés à la vie chère que rencontrent les guadeloupéens, en raison du monopole que détiennent certaines familles sur des secteurs divers et variés. Voulus par Nicolas Sarkozy, les états généraux de l’Outre-Mer ne manqueront pas d’aborder la question, afin de mettre un terme à cette situation, derniers résidus de l’esclavage...

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